Résumés du n° 69 (printemps - été 2015)
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Dossier : Vers un retour de l’errance L’identité juive sépharade dans la littérature et le cinéma francophones
Récits de Juifs algériens en métropole : parcours personnel, histoire commune par Rosa A. Perez
Nombreux sont les récits d’écrivains français d’origine judéo-maghrébine dans lesquels le travail de mémoire et la quête identitaire sont au centre de la démarche littéraire. Le parcours individuel est souvent lié à celui de la communauté et traduit le difficile ancrage social de ces déracinés. Jean-Luc Allouche et Yannick Alimi sont représentatifs d’une génération marquée par le trauma de l’exil. Alors que le premier cherche à raviver une mémoire personnelle pour tenter de comprendre son mal-être, Alimi met en cause la préservation et la transmission obsessive de la mémoire collective des exilés.
There are numerous narratives of French Jewish writers from the Maghreb in which the work of memory and identity are central to the literary endeavor. The personal path is often linked to the community and translates the difficult social integration of uprooted Jews. Jean-Luc Allouche and Yannick Alimi are representative of a generation affected by the trauma of exile. While Allouche tries to revive his memory in order to understand his malaise, Alimi blames the obsessive way in which the exiled Jews preserve and transmit the collective memory.
Ni d’ici, ni d’ailleurs : errance et crise identitaire dans les romans de Chochana Boukhobza par Irena Trujic
Cet article étudie la thématique de l’identité dans Un été à Jérusalem (1986) et Le Troisième Jour (2010) de Chochana Boukhobza. Ne supportant plus la pression imposée par leur famille respective, les héroïnes de ces deux romans ont quitté Israël pour faire leur vie ailleurs et ne reviennent à Jérusalem que le temps d’un séjour. Leur identité sera profondément modifiée par la ville dont l’auteur propose une personnification.
This paper focuses on the theme of identity in Chochana Boukhobza’s novels Un été à Jérusalem (1986) and Le Troisième Jour (2010). As the main characters could no longer handle family pressure, they moved out of Israel to build their lives and only came back to Jerusalem for a short stay. Their identity is then deeply modified by the city itself, which is personified in both novels.
Revisiter une « sépharadité », imaginaire et imaginée par Mechthild Gilzmer
Dans cet article nous présentons trois auteurs sépharades qui vivent et qui écrivent dans des contextes culturels et géographiques différents. Nous posons la question comment ces écrivains, de la génération des Juifs « sépharade » née dans la diaspora, parlent-ils du passé dans leurs écrits. Quelles sont les caractéristiques de la « sépharadité » que ces jeunes artistes mettent en avant ?
The follow article presents artistic work from three different Jewish authors with Sephardic origin living and working in different cultural and geographical areas. We analyse most specifically the way these writers born in the diaspora integrate the past in their work and by which means these young artists refer to the “Sephardic” identity in their literary work.
À la recherche du temps perdu. Les parcours nostalgiques d’une enfance juive marocaine dans les nouvelles de Bob Oré Abitbol par Dinah Assouline Stillman
Bob Oré Abitbol, juif marocain exilé, touche-à-tout de génie, entrepreneur, homme d’affaires, écrivain, poète, auteur de théâtre, éditeur, ayant vécu en France, au Canada, au Mexique et aux États-Unis, semble tout à fait représenter le Juif errant moderne. Ses nouvelles relatives à son enfance au Maroc dépeignent des personnages hauts en couleur dans lesquels nombre de ses coreligionnaires exilés, comme lui, de par le monde se retrouvent et se remémorent avec nostalgie leurs propres souvenirs d’enfance.
Bob Oré Abitbol, a Moroccan Jewish exile, jack of all trades, entrepreneur, businessman, author, poet, and playwright, having lived in France, Canada, Mexico, and the United States, seems to perfectly represent the modern Wandering Jew. His stories of his childhood in Morocco depict colorful characters in which his coreligionists, exiled throughout the world like himself, can recall with nostalgia their own childhood memories.
Dans et hors d’Afrique du Nord, l’identité juive féminine dans le cinéma francophone par Nina B. Lichtenstein
Cet article propose de considérer le choix des lieux opérés par la réalisatrice Karin Albou dans deux de ses films, La Petite Jérusalem et Le Chant des Mariées, comme une façon de présenter des portraits intimes de la complexité identitaire féminine. Offrant une vision des femmes de l’intérieur de leur maison, au travers des fenêtres, des cours et des espaces réservés aux femmes comme le hammam ou le mikveh (bain rituel), les films témoignent, de façon particulièrement importante pour notre époque contemporaine, d’une culture partagée entre arabes et Juifs qui joue un rôle fondamental dans cette identité sépharade.
This article proposes to examine filmmaker Karin Albou’s choices of place in the two films La Petite Jérusalem and Le Chant des Mariées as a way to create intimate portraits of the complex construction of feminine identity. Drawing on the vision of women from the inside of houses, through windows, courtyards and feminine spaces such as the hammam and the mikveh/ritual bath the films reflect a shared culture of Arabs and Jews that makes the role of this Sephardic narrative and identity as reflected in film all the more relevant today.
Varia : histoire
Apprentissage de l’hébreu en Tunisie, constantes et transformations par Hala Ben Mbarek
L’objet de ce travail est de passer en revue, de manière chronologique, et dans la limite du possible, les principales caractéristiques de l’histoire de l’enseignement de l’hébreu dans le système éducatif tunisien entre les XIXe et XXe siècles. Dans un premier temps, par qui et comment a-t-il été pratiqué dans les écoles traditionnelles juives ? Quels sont les aspects de l’éducation de l’hébreu dans les écoles juives traditionnelles ? Dans un deuxième temps, comment la communauté juive tunisienne affronte-t-elle l’influence européenne à la suite du Protectorat français, à l’arrivée et à l’action des congréganistes et des Juifs européens ? Quel rôle a joué l’Alliance israélite universelle dans la rénovation de l’enseignement juif ? De quelle manière les méthodes modernes devaient-elles rénover peu à peu, inévitablement, le vieux système traditionnel ? Enfin, nous nous proposons de tracer le caractère actuel de cet enseignement et son évolution.
The aim of this study is to examine the main characteristics of the history of the teaching of Hebrew in the Tunisian educational system between the 19th and the 20th century’s. It starts by recalling the aim of elementary schooling in Jewish traditional education in Tunis and discuss aspects of the basic Hebrew education in traditional Jewish schools. In a second time, it defines and characterizes the beginning of reform following the establishment the Alliance israélite universelle and the congregation’s schools at the turn of the twentieth century. In section three, I explain how Tunisian Jewry confronts the European influence following the French establishment. The emergence of Zionism, the American institutions, and the Tunisian independence contributed to the process of modernization. The last section focuses on the Transition from Traditional to Modern Education, as a consequence of important work that has been done during the last three generations in the method of Teaching of the Hebrew language.
Les écoles de l’Alliance israélite universelle et la renaissance de l’hébreu en Eretz Israël par Georges Weill
La première école de l’Alliance israélite universelle en Palestine ottomane a été créée à Jaffa en 1864. En raison de multiples obstacles, notamment l’opposition des rabbins orthodoxes contre les études profanes et l’éducation des filles, le réseau scolaire ne fut complètement constitué qu’en 1906. Il comprenait dix écoles primaires de garçons et de filles à Jaffa (puis à Tel-Aviv), Haïfa, Jérusalem, Safed et Tibériade, ainsi que deux écoles professionnelles à Mikveh Israël (1870) et à Jérusalem (1880). Les écoles de l’Alliance ont joué un rôle essentiel dans la renaissance de l’hébreu moderne, grâce à des instituteurs acquis aux méthodes actives, aidés de savants hébraïsants membres d’Hibbat Zion, comme l’ont montré les travaux du regretté Jean-Marie Delmaire sur l’œuvre des pionniers de ce mouvement en Eretz Israël à la fin du XIXe siècle.
The first school of the Alliance israélite universelle in Palestine was opened in Jaffa in 1864. Owing to numerous barriers, including the opposition of the orthodox rabbis against the secular studies and the education of girls, the school network was only achieved in 1906. It included ten primary schools of boys and girls in Jaffa (then Tel-Aviv), Haïfa, Jerusalem, Safed and Tiberiade, and two professionnal schools in Mikveh Israel (1870) and Jerusalem (1880). The Alliance schools played a key rôle in the revival of the modern hebrew, thanks to teachers followers of activity-based education and brilliant hebraist scholars members of Hibbath Zion. This study pay tribute to the researches of the late Jean-Marie Delmaire devoted to the work of this pioneer movement in Eretz Israel at the end of the 19th century.